Zu Produktinformationen springen
1 von 2

KRBooksStore

Mystiques: La Collection Complète - Ebook (Édition française)

Mystiques: La Collection Complète - Ebook (Édition française)

Normaler Preis $10.99 CAD
Normaler Preis $14.99 CAD Verkaufspreis $10.99 CAD
Sale Ausverkauft
Versand wird beim Checkout berechnet
  • Achetez votre livre numérique
  • Recevez le lien de téléchargement par e-mail
  • Envoyez-le à votre lecteur préféré

Une série haletante, par l’auteure primée Kim Richardson, entraîne ses lecteurs dans un voyage fantastique plein de personnages loufoques, d’intrigues impénétrables et de secrets, au cœur d’un monde peuplé de mystiques.

Le coffret contient les troi livres de la série.

Jeune orpheline de quatorze ans, Zoey St John est une adolescente ordinaire douée de facultés extraordinaires—elle peut voir des monstres.

Mais lorsqu’elle fait la connaissance d’une société secrète appelée l’Agence, dont les membres partagent le don exceptionnel de voir le monde surnaturel, Zoey est transportée vers un lieu étrange, où les monstres et les humains coexistent, et où les gangs de farfadets, les fées géantes et les boules de bowling suceuses de sang peuplent le quotidien.

Bientôt, un mystère éclot. Un dispositif permettant de déclencher une désastreuse invasion de monstres vient d’être dérobé. Zoey et ses amis vont tout faire pour le retrouver, mais le temps presse.

 

DESCRIPTION DES LIVRES:

  • Le septième sens
  • La Nation Alpha
  • Le Nexus

Synopsis

Jeune orpheline de quatorze ans, Zoey St John est une adolescente ordinaire douée de
facultés extraordinaires—elle peut voir des monstres.

Mais lorsqu’elle fait la connaissance d’une société secrète appelée l’Agence, dont
les membres partagent le don exceptionnel de voir le monde surnaturel, Zoey est
transportée vers un lieu étrange, où les monstres et les humains coexistent, et où les gangs de farfadets, les fées géantes et les boules de bowling suceuses
de sang peuplent le quotidien.

Bientôt, un mystère éclot. Un dispositif permettant de déclencher une désastreuse
invasion de monstres vient d’être dérobé. Zoey et ses amis vont tout faire pour
le retrouver, mais le temps presse.

Lire l'échantillon

Zoey tourna à l’angle de la ruelle et quelque chose bougea le long du mur qui lui faisait face. Elle aperçut des teintes vertes et rouges scintiller comme des diamants dans la lumière pâle, tandis que la tête et le corps d’un serpent géant traversaient la ruelle derrière le Poo Ping Palace Cuisine Thaï, lui bloquant le passage. Le reptile avait une seconde tête à la place de la queue. Ses langues grises fourchues sifflèrent dans l’air avant de parler.

« Nous ne repartirons jamais. Tu ne peux pas nous y forcer. Tente quoi que ce soit et nous t’arracherons le cœur, humaine. »

Elle n’avait pas la moindre idée de ce dont il était en train de parler. C’était la troisième créature qu’elle rencontrait aujourd’hui, et de loin la plus hideuse. De la salive blanchâtre formait des flaques écumantes et venimeuses sur le sol au-dessous de ses deux têtes.

Zoey ravala sa terreur.

« Je ne comprends pas ce que vous me dites », répondit-elle d’une voix ferme. Elle jaugea la ruelle pour trouver un moyen de s’échapper et s’assurer que personne d’autre ne l’observait.

« Je veux juste rentrer chez moi, poursuivit-elle, et je ne veux causer aucun problème, Monsieur Serpent — ou Madame ? Difficile à dire, étant donné que votre arrière-train a une tête — à moins que ce soit votre tête, et que l’autre se trouve sur votre arrière-train ? Mais comment faites-vous pour aller aux — »

« Cette chose nous ment ! » La haine brillait dans ses yeux jaunes.

Les deux têtes ouvrirent leurs mâchoires, révélant des rangées de dents semblables à des couteaux de cuisine.

« Elle veut nous tuer ! Elle essaie de nous piéger. »

Les têtes se parlaient l’une à l’autre. « On ne peut jamais faire confiance à un humain — ce sont tous des menteurs et des tricheurs ! Elle veut nous renvoyer chez nous ! Mais c’est hors de question. Non — nous ne rentrerons jamais ! »

Le reptile tourna ses deux têtes vers Zoey. « Nous n’allons pas te laisser faire ! »

Zoey n’avait aucune envie de mourir étouffée par l’abominable duo que formaient Monsieur et Madame Serpent — elle avait de grands projets d’avenir. Elle devait agir sans attendre.

La bête se recroquevilla pour attaquer.  

Zoey n’eut même pas le temps de fouiller dans son sac à dos pour en sortir une arme. Le gigantesque serpent se déploya dans les airs, comme un diable sur ressort, et bondit sur elle.

Une porte s’ouvrit à la volée et un homme à la peau sombre, portant un tablier taché, en sortit précipitamment. « Eh ! Qu’est-ce qui se passe ici ? » cria-t-il avec véhémence.

La créature retomba sur le sol et battit en retraite dans la pénombre en sifflant rageusement, avec une rapidité que Zoey n’aurait jamais crue possible de la part d’une si grosse bestiole.

L’homme jeta deux énormes sacs poubelles noirs sur le sol et brandit le poing en direction de Zoey. « C’est toi qui barbouilles mes murs de graffitis, n’est-ce pas ? Va-t’en, gamine, avant que j’appelle la police ! »

Zoey sourit en regardant le mur peinturluré derrière lui, sur lequel on avait écrit Ping Pong Restaurant Thaï. Elle s’élança dans la ruelle au pas de course, non sans avoir jeté un dernier coup d’œil sur le serpent géant qui disparaissait au même instant par le soupirail d’un sous-sol.

La voix de l’homme en colère résonnait encore à ses oreilles lorsqu’elle atteignit le fond de la ruelle. Elle tourna à droite sur Wade Street. Les vieux platanes qui longeaient la rue de part et d’autre étaient la seule végétation qui s’offrait à la vue. Elle traversa en courant le quartier des orphelins et passa devant plusieurs bâtiments décrépits et usines désaffectées, soulagée d’avoir réussi à s’échapper. 

C’était trop beau pour être vrai — elle avait failli passer une journée entière sans incidents. Mais les monstres la retrouvaient toujours.

Le numéro 85 sur Wade Street était une vieille maison grise, délabrée et sinistre, avec un toit tout de guingois, un vaste porche en bois pourri, des volets écaillés et une porte d’un beige défraîchi qui avait dû autrefois arborer un blanc éclatant. La pelouse devant l’entrée était une friche de pissenlits et d’herbes folles qui lui arrivaient au genou. Zoey gravit les escaliers, franchit la porte d’entrée et se rua vers la cuisine de l’autre côté de la maison. Elle fit glisser son sac à dos de ses épaules, qui tomba sur le sol avec un bruit mat.

« Tu es en retard. »

Sa mère d’accueil numéro 28 avait une énorme veine violette qui palpitait sur son front à chaque fois qu’elle parlait. Zoey avait l’impression de se tenir devant un gorille moulé dans un collant de gymnastique étriqué. Elle était épaisse et trapue, avec des cheveux noirs hirsutes qui surmontaient une grosse tête où des poils noirs et drus poussaient sur son menton comme des mauvaises herbes. On aurait facilement pu la confondre avec un homme. Elle affichait tout le temps la même mine renfrognée, et pourtant aujourd’hui, il y avait quelque chose de différent sur son visage. Ses yeux étaient éteints, comme si elle se trouvait dans une sorte de transe.

La peau de Zoey fut parcourue d’une chair de poule glaciale.

« Combien de fois t’ai-je prévenue, Zoey ? En retard signifie : pas de dîner. Tant pis, tu auras faim jusqu’à demain. »

Zoey en oublia l’angoisse qui l’avait envahie un instant plus tôt.

« Mais il n’est que six heures dix », protesta-t-elle en sentant que son estomac se mettait à gronder.  

Elle baissa les yeux. Son sweatshirt informe et trop large pendait sur son corps frêle, et son jean était deux fois trop large pour elle. Les seules affaires qui lui allaient correctement étaient ses Converse noires et blanches.

La moustache sur la lèvre supérieure de sa mère d’accueil numéro 28 se tordit lorsqu’elle examina Zoey.

« C’est uniquement de ta faute, les règles sont les règles. Si tu y prêtais un peu plus attention et si tu passais un peu moins de temps dans cette bibliothèque à regarder Dieu sait quoi sur internet, tu serais à l’heure comme nous tous. » Sa voix résonnait dans la petite cuisine comme dans un mégaphone.

« Tu peux t’asseoir près de Thomas. Tu le regarderas manger, lui et les autres enfants. Assise ! » ordonna-t-elle.  

Zoey s’approcha de la table de la cuisine en titubant, tira une chaise et s’assit. Elle savait qu’il était inutile de discuter, et se contenta donc de regarder les enfants attablés.

Thomas était un garçon de onze ans, aux dents de devant trop grandes et au rire nerveux. Ses yeux marron s’agrandirent, et il lui fit un petit sourire avant de retourner à son repas. Isabelle et Andy étaient assis de l’autre côté de la table. Isabelle avait treize ans. Ses cheveux bruns formaient un amas bouclé, presque spongieux, sur sa tête, et elle avait un goût prononcé pour le maquillage et les gros bijoux en toc. Andy était assis près d’elle. Il cachait son visage sous des mèches de cheveux noirs, mais Zoey pouvait voir que ses yeux étaient cerclés de rouge. Elle estimait qu’il avait une dizaine d’années. Cela ne faisait que quelques jours qu’il était parmi eux, et il n’avait toujours prononcé aucun mot.   

« Comment ça va aujourd’hui, Andy ? » chuchota Zoey.

Elle se rapprocha de lui et se pencha pour mieux voir son visage.

« Tu n’as pas touché à ton dîner. Tu n’as pas faim ? »

Mais Andy ne répondit pas. À la place, il fixait son bol de ragoût d’un air sombre, sans vraiment le regarder. Ses yeux tristes étaient perdus, très loin d’ici.

Zoey connaissait ce regard. Le système de familles d’accueil avait cet effet sur les enfants. Ils étaient solitaires et abandonnés, sachant qu’on ne les retrouverait plus et qu’ils ne seraient plus jamais aimés. C’était une bien sinistre perspective. Ils étaient rejetés par la société, mis au rebut — même leurs propres familles ne s’occupaient pas d’eux. Chaque enfant recueilli qu’elle avait connu comptait les jours qui le séparaient de son dix-huitième anniversaire — du jour où il serait considéré comme un adulte, où il serait libre.

Zoey avait encore quatre ans à tenir.

« Qu’est-ce que tu faisais à la bibliothèque ? » chuchota Thomas, en prenant soin de ne pas attirer l’attention de leur mère d’accueil numéro 28. Et comme Zoey ne répondait pas, il soupira bruyamment avant de retourner à son ragoût. Il semblait être le seul intéressé par ces morceaux agglutinés, marron et gluants.

Ce n’était pas que Zoey voulait cacher à Thomas l’objet de ses lectures ; elle n’arrivait tout simplement pas à le lui dire. Des recherches sans fin sur internet à propos des démons et du monde occulte n’étaient pas une activité normale pour une fille de quatorze ans.

Et Zoey était loin d’être normale.

En fait, elle était à l’exact opposé de la normalité. Au lieu de baver sur les chanteurs, le maquillage et les vêtements — comme les adolescentes normales — elle employait chacun de ses temps libres à faire des recherches sur les phénomènes surnaturels. Elle dévorait tout ce qui avait trait aux monstres et au fantastique. C’était comme une addiction. Elle était un véritable Wikipédia ambulant spécialisé dans le surnaturel.

Zoey craignait la réaction des gens s’ils apprenaient qu’elle pouvait voir des monstres. Elle savait bien qu’elle n’était pas normale. Et elle était prête à tout pour découvrir qui elle était vraiment. Elle avait toujours gardé secrets ses dons, et elle faisait de son mieux pour se mêler aux enfants normaux. Le problème était que les ennuis semblaient toujours la retrouver.

Elle s’avachit sur sa chaise en soupirant. « Et bien, apparemment je ne rate pas grand-chose. J’ai mangé tellement de ragoûts de bœuf dans ma vie que c’est un miracle si je n’ai pas une paire de sabots à la place des pieds. »  

Isabelle jeta un coup d’œil à Thomas et tous les deux se mirent à glousser de façon incontrôlable.

 « Silence ! » La mère d’accueil numéro 28 abattit son poing sur la table, faisant dégringoler les verres, les couteaux, les assiettes et les cuillères sur le sol.

« Je commence à en avoir assez de toi, espèce de petite délinquante. Tu te crois au-dessus des règles, c’est ça ? Et bien ce n’est pas le cas ! Tu n’es qu’un déchet, Zoey ; un lamentable déchet dont personne ne veut. »

Elle agrippa les rebords de la table et des perles de sueur se mirent à ruisseler sur son gros visage. « On aurait dû te laisser pourrir dans cet orphelinat », dit-elle avec un sourire malveillant.

 « Ouais, vous auriez peut-être dû. »

Zoey jeta négligemment un coup d’œil sur ses ongles sales. Elle se mit à les curer en haussant les épaules. « Mais j’imagine que les chèques du gouvernement vous ont aidés à prendre cette décision. Je veux dire — soyons honnêtes — c’est la seule raison pour laquelle nous sommes tous ici, n’est-ce pas ? Tous entassés dans une seule chambre ? Je ne sais pas pour vous, mais moi je ne ressens aucun amour. »

Sa mère d’accueil fronça sévèrement les sourcils et examina Zoey comme si elle était contagieuse. « Avec cette attitude effrontée, personne ne voudra jamais de toi. Tu ne trouveras jamais de foyer. Tu n’auras jamais une vraie famille. Tu resteras coincée dans ce système pour toujours. »

Zoey sentit son cœur se serrer, pourtant son expression restait froide et impassible. « Pas pour toujours. Il me reste encore quatre ans à tirer, et après je dirai bye bye au système. »

« À l’orphelinat, ils nous avaient dit que tu étais différente — »

Sa mère d’accueil pointa une cuillère pleine de ragoût vers Zoey comme si c’était une épée. « — mais à part tes affreux cheveux roux qui ressemblent à un feu de forêt et ton mépris pour les règles, je n’ai jamais rien vu de différent ou de spécial chez toi. Tu es exactement comme tous les autres enfants recueillis qui sont passés ici… rien qu’un ramassis d’ordures sans valeur. »

Zoey lut la douleur sur le visage des autres enfants. Elle fit craquer les jointures de ses doigts sous la table. Elle avait une folle envie de faire disparaître d’un coup de poing le sourire du visage de cette femme.

« Si seulement tu étais jolie comme Isabelle, dit la mère d’accueil numéro 28 tout en léchant sa cuillère, alors peut-être que nous aurions une base sur laquelle travailler — »

« Elle peut voir des monstres », l’interrompit innocemment Isabelle.

Elle sourit à Zoey comme si elle lui faisait une faveur et entortilla son grand collier vert autour de son poignet. « Elle a dit qu’il y avait un monstre dans le jardin de derrière cette nuit. Je n’ai rien pu voir, mais elle a dit qu’elle le pouvait. Alors j’imagine que ça la rend spéciale. »

Le secret de Zoey venait d’éclater au grand jour.

Tous les yeux se posèrent sur elle. Elle les voyait déjà échafauder des scénarios dans leurs têtes. Elle avait déjà vu ce regard nerveux auparavant.

Isabelle croisa le regard furieux de Zoey et perdit son sourire. Son visage blêmit et les larmes lui montèrent aux yeux. Zoey en éprouva aussitôt de la honte. Ce n’était pas de la faute d’Isabelle. Elle essayait juste de l’aider.

La mère d’accueil numéro 28 fit un pas en avant, triomphante, comme si elle avait attendu toute sa vie d’apprendre une telle information. Un bruit bizarre s’échappa de sa gorge, semblable au grognement d’un animal sauvage. De la sueur dégoulinait le long de son nez avant de finir sa course sur la table.

Zoey détourna le regard et s’agita sur sa chaise, mal à l’aise. Pourquoi sa mère d’accueil la dévisageait-elle ainsi ? D’habitude, quand les gens apprenaient son don, ils l’évitaient.

Soudain, elle eut à nouveau la chair de poule.

Un frisson incontrôlable la parcourut, comme si des milliers d’insectes couraient le long de sa peau. Elle réagissait toujours de cette façon lorsqu’elle se trouvait en présence de démons et de monstres. Elle avait eu cette sensation dès qu’elle avait posé le pied dans la cuisine. Elle appelait ça avoir des fourmis. C’était comme un avertissement, elle n’avait aucune idée de ce qui le provoquait, mais ça lui avait sauvé la vie à plusieurs reprises.

Or pourquoi le ressentait-elle à présent ?

Quand elle leva la tête, les yeux de la mère d’accueil numéro 28 étaient devenus entièrement noirs, comme les yeux d’un requin. Ses habits étaient trempés de sueur, et ses odeurs corporelles s’intensifièrent. La femme se mit à trembler et à se gratter fiévreusement les bras jusqu’à ce que du sang vienne colorer des nombreuses entailles qu’elle avait infligées à sa chair.

« Euh… vous devriez peut-être arrêter de faire ça », dit Zoey.  

Elle regardait sa mère d’accueil sans ciller, se préparant au moindre geste brusque. Une odeur étrange provenait de la femme, des effluves d’œufs pourris mélangés à de la terre mouillée. Puis elle se mit à gronder d’un air affamé, comme si quelque chose d’inhumain avait pris possession de sa gorge.

Zoey sentit un frisson courir le long de son dos.

Génial, c’est reparti, songea-t-elle. Et je n’ai même pas eu l’occasion de manger un morceau.

La femme se pencha en avant par-dessus la table, ses yeux noirs luisant de mépris et de haine. « Tu as cru pouvoir te cacher ici et échapper aux autres ! Tu as cru qu’on ne te retrouverait jamais ! »

Sa voix rauque semblait appartenir à une autre personne.  

« Intelligent — mais pas suffisant. Vous autres les agents, vous êtes tous les mêmes — sales fouineurs — vous voulez toujours tout contrôler. »

Zoey se crispa sur sa chaise, elle se tenait prête.  

« J’ignore de quoi vous parlez. Je ne me cache de personne — et je suis trop jeune pour être un agent du FBI. Je viens d’avoir quatorze ans la semaine dernière. »

Un sourire mauvais se matérialisa sur le visage de la femme.

« Tu crois qu’un jour nous, les mystiques, nous obéirons à vos lois ? Ah ! Sales créatures de chair et de sang — vous n’êtes pas nos maîtres. Vous êtes trop faibles. Nous ne retournerons jamais au Nexus. Nous nous plaisons bien ici, parmi vous, les humains », siffla-t-elle.

Une écume blanche se formait à la commissure de ses lèvres, comme sur un chien enragé.

« Je tuerai jusqu’au dernier les agents qui tenteront de me renvoyer ! »

Un filet de bave jaillit de sa bouche et atterrit sur la table, laissant des trous brûlants dans le bois.

Zoey bondit sur ses pieds et se tourna vers les autres. « Sortez d’ici ! Maintenant ! Vite ! »

Les enfants se levèrent en hâte, terrifiés, et s’éloignèrent précipitamment de la femme. Mais ils se figèrent soudain face au spectacle qui les attendait.

La mère d’accueil numéro 28 hurlait comme un animal. Ses doigts et ses orteils commencèrent à se transformer en des serres noires luisantes. Sa peau se craquela et se brisa comme une coquille d’œuf. Son corps convulsait, et sa peau se mit à peler et à tomber en petits tas sur le sol, dans une mare de liquide noir.

Avant qu’ils aient pu esquisser le moindre mouvement, une créature de plus de deux mètres de haut, à la peau rugueuse couverte de furoncles et de plaies noires purulentes, se tenait devant eux dans la cuisine. Six pointes taillées grossièrement dépassaient de son dos ; des bras et des jambes, longs et effilés, sortaient de son corps rond et charnu. Elle darda sur Zoey un regard cruel, de ses quatre gros yeux rouges. Elle ouvrit les mâchoires en poussant un hurlement, révélant des rangées de dents pointues, tranchantes comme du verre. Elle allait la réduire en pièces.

Zoey reconnut la créature. C’était celle qu’elle avait vue la nuit dernière. Tel un parasite géant, cette chose avait réussi à se servir du corps de la mère d’accueil numéro 28 comme d’un hôte.

« Qu’est-ce qui lui arrive ? » gémit Thomas, ses yeux bleus écarquillés par la peur. « Elle est devenue folle, on doit appeler les urgences ? Elle a peut-être besoin d’un docteur ! »

Zoey savait que les enfants normaux étaient incapables de voir les horreurs qu’elle avait sous les yeux. Ils ne pouvaient pas voir ni sentir la créature répugnante qui se tenait dans la cuisine — ils ne voyaient que leur mère d’accueil, folle de rage, se comportant comme un tueur en série aliéné.

Zoey attrapa les bords de la table.

« Les amis, vous devez sortir d’ici, et vite ! Montez et fermez vos portes à clé. Maintenant ! »

Le monstre gloussa en s’élançant vers elle.

« Courez ! »

En un éclair, Zoey projeta la table de la cuisine sur la créature, la plaquant quelques instants contre le plan de travail. Elle bondit sur le côté et courut vers son sac à dos. Isabelle, Thomas et Andy disparurent quant à eux dans les escaliers, en proie à une folle panique.

Dans un craquement retentissant, le monstre riposta et pulvérisa la table en une explosion d’échardes.

Zoey se retourna. Elle tenait fermement un sac de sel dans sa main.

« Je vais te tuer, agent », gronda le démon.

Des gouttes de bave acide brûlaient le sol sous ses pieds.

« Je vais t’arracher le cœur et le dévorer ! »

La créature fendit l’air en direction de Zoey.

Mais Zoey ouvrit le sac et arrosa le démon.  

Le sel atteignit la créature en un nuage de poussière blanche. Elle hurla et se mit à courir tout autour de la cuisine en se cognant aux placards et aux appareils ménagers. De la vapeur montait du corps du monstre, et l’air était rempli d’une odeur putride de chair brûlée.

Zoey faillit s’étouffer. Les émanations lui piquaient les yeux.  

La créature cessa de s’agiter et tourna vers elle ses yeux rouges accusateurs. Elle se rua à nouveau dans sa direction.

Mais Zoey était prête. Elle jeta une autre poignée de sel à la tête du démon.

La créature s’arrêta en plein mouvement et s’effondra à terre, prise de convulsions. Des pustules noires éclataient sur son corps, et des sécrétions fétides se répandirent sur le sol. Enfin, le démon explosa en cendres noirâtres, laissant derrière lui une odeur de soufre et un hurlement d’agonie qui perça les tympans de Zoey.

Elle essuya les dernières vapeurs de ses yeux et balaya les cendres noires du bout de sa chaussure, pour s’assurer que la créature avait bien été intégralement détruite. La peau de sa mère d’accueil avait fondu. Elle ne formait plus qu’une petite flaque d’eau. 

Pourquoi la créature l’avait-elle appelée agent ? Et qu’était-ce donc que ce Nexus ? Elle n’avait aucune réponse à ses questions.  

« Zoey ? » Thomas passa la tête en haut des escaliers, et sa bouche s’ouvrit lorsqu’il aperçut la scène en contrebas.

« Qu’est-ce qui s’est passé dans la cuisine ? Où est la mère d’accueil ? Qui va nous faire à manger maintenant ? » Isabelle et Andy pointèrent leurs têtes derrière lui, se servant de leur ami comme d’un bouclier humain.

Zoey essuya le sel de ses mains contre son jean.

« Elle… elle n’était plus elle-même. Et maintenant elle est partie et ne reviendra pas. Vous devez faire vos valises et appeler le numéro d’urgence des services sociaux, sur le frigo. Ils enverront quelqu’un vous chercher. Isabelle, tu es la plus grande, c’est toi qui devrais t’en charger. »

Isabelle se redressa derrière Thomas. « Mais pourquoi t’a-t-elle attaquée ? Pourquoi faire une chose pareille ? On aurait dit qu’elle voulait te tuer, hein ? »

Isabelle essuya son nez qui coulait du revers de sa manche. Ses yeux étaient rouges.

Zoey haussa les épaules. Ils la prendraient pour une folle si elle leur expliquait la vérité. « Parfois, les grands perdent la tête. Je ne sais pas. Écoutez, je dois partir et régler quelques affaires. Appelez le numéro et restez tranquilles, ils enverront quelqu’un ; je vous le promets. »

Elle emballa ce qui restait de sel dans son sac à dos, le balança sur ses épaules et se dirigea vers la porte d’entrée.

« Attends ! s’écria Isabelle. Ne nous laisse pas, s’il te plaît ! Et si elle revient ? »

Zoey s’arrêta devant la porte, mais elle ne se retourna pas. Elle resta un moment ainsi avant de répondre. « Elle ne reviendra jamais. Tout va bien maintenant — ne vous inquiétez pas. Appelez le numéro et n’essayez pas de me suivre. »

Puis elle ajouta à voix basse. « Je suis poursuivie par la mort et les monstres. »

Zoey n’attendit pas d’entendre la réponse d’Isabelle. Elle tira la porte d’entrée et se précipita dans la rue.

Il devait bien y avoir une raison pour laquelle elle pouvait voir des monstres là où le reste du monde était aveugle devant eux. Et elle était déterminée à découvrir pourquoi. Elle devait retourner à la bibliothèque et aller sur internet. Il y avait forcément quelque chose à propos du Nexus en ligne — c’était certain.

La bibliothèque du coin surplombait d’autres bâtiments, telle une montagne de béton. Gravé dans la pierre, on pouvait lire : Bibliothèque publique de Toronto, Gladstone / Antenne de Bloor. Une douce lumière jaune se déversait depuis les fenêtres alignées, et Zoey pouvait apercevoir les ombres des gens qui se déplaçaient à l’intérieur.

En faisant de son mieux pour éviter les flaques, elle traversa la route en courant. Elle était déserte, à l’exception d’une vieille femme qui portait un parapluie jaune. Un taxi passa près d’elle à vive allure et l’arrosa d’une gerbe d’eau.

« Eh ! » cria Zoey, furieuse. Il allait lui falloir des lustres avant de sécher à présent. L’eau pénétra dans ses chaussures tandis qu’elle se hâtait de rejoindre la vieille dame sur le trottoir.

Soudain, elle entendit un grognement qui n’avait absolument rien d’humain.

Zoey s’arrêta net et se retourna vivement. La vieille femme avançait lentement, sous la pluie. D’où pouvait bien provenir le bruit ? Elle se dit que ce n’était probablement qu’un raclement de gorge de la vieille dame, et elle tourna les talons pour gagner la bibliothèque. Elle accéléra le pas, mais elle sentit soudain la chair de poule la parcourir — comme un fourmillement.

Un cri strident retentit derrière elle. Puis elle entendit un battement d’ailes et un gémissement à glacer le sang.

Son cœur cognait dans ses oreilles, mais elle s’arrêta et se retourna.

Une créature atterrit derrière la vieille dame. Elle avait la taille d’un cheval, ressemblait à une gargouille de château médiéval, et avait une forme humaine. Sa peau était recouverte d’écailles noires et huileuses, et elle avait de longs doigts et orteils griffus. De larges ailes membraneuses s’étiraient derrière elle, projetant une ombre noire sur la femme. Des piques lui hérissaient le dos et une longue queue acérée fouettait l’air de façon menaçante. Elle avait des cornes de taureau, et une grande gueule garnie de dents pointues comme des aiguilles. Mais c’était son visage qui la dérangeait le plus — la créature n’avait pas d’yeux.

Le pouls de Zoey s’emballa.

La vieille dame ne pouvait pas la voir. Elle s’arrêta de marcher et regarda devant elle, la mine perplexe. Son parapluie lui tomba des mains. Le démon déploya ses ailes et ouvrit grand la gueule. Une brume blanche scintillante se détacha de la vieille dame, comme un voile transparent, et fut aspirée directement par la bouche de la créature. Sa peau prit une teinte grisâtre, et elle se mit à trembler de manière incontrôlable. La créature était en train d’ingérer sa force vitale.

Un mélange de peur et de haine déferla sur Zoey, tandis qu’elle dévisageait le monstre. Il ne devait pas mesurer moins de deux mètres cinquante. Les yeux de la vieille dame se révulsèrent. Elle allait mourir.

« Ça suffit ! » La voix de Zoey retentit dans la rue, plus fort qu’elle ne l’aurait voulu. Elle avait l’air sûre d’elle, et pourtant elle avait si peur que sa bouche en était toute desséchée.

« Laisse-la ! Tu es en train de la tuer ! »

Ce fut efficace. Le démon se désintéressa de la vieille femme.  

Elle s’effondra à genoux sur le sol. Sa vie ne tenait plus qu’à un fil.

La créature tourna son visage sans vie vers Zoey.

Sa queue battait de grands coups derrière elle, et Zoey pouvait sentir son insatiable faim. On aurait dit un chien bavant devant un os. La bête releva la tête, comme si elle cherchait à renifler une odeur. Elle jeta un nouveau coup d’œil sur la vieille femme, puis se dirigea vers Zoey. Elle venait de choisir la meilleure proie.

Zoey grimaça en sentant son abominable puanteur. L’air était devenu irrespirable, comme chargé de miasmes.   

L’adrénaline pulsait dans ses veines. Elle se campa fermement sur ses jambes, plongea la main dans son sac à dos et jeta une poignée de sel sur la créature qui s’approchait toujours.

Les cristaux blancs arrosèrent la bête comme une abondante chute de neige. Elle s’arrêta, l’air surpris. Puis elle se contenta de se secouer avant de reprendre sa progression.

Un petit cri échappa des lèvres de Zoey. Le sel n’avait eu aucun effet.

Dans un battement d’ailes, le démon bondit dans les airs et fondit sur elle.

 

Vollständige Details anzeigen